Théorème de Lax-Milgram

Le théorème de Lax-Milgram – des noms de Peter Lax et Arthur Milgram, auxquels on adjoint parfois celui de Jacques-Louis Lions – est un théorème de mathématiques s'appliquant à certains problèmes aux dérivées partielles exprimés sous une formulation faible (appelée également formulation variationnelle). Il est notamment l'un des fondements de la méthode des éléments finis.

Énoncé

Soient :

  • H {\displaystyle {\mathcal {H}}} un espace de Hilbert réel ou complexe muni de son produit scalaire noté , {\displaystyle \langle \cdot ,\cdot \rangle } , de norme associée notée {\displaystyle \|\cdot \|}  ;
  • a ( , ) {\displaystyle a(\cdot ,\cdot )} une forme bilinéaire (ou une forme sesquilinéaire si H {\displaystyle {\mathcal {H}}} est complexe) qui est :
    • continue sur H × H {\displaystyle {\mathcal {H}}\times {\mathcal {H}}}  : c > 0 ( u , v ) H 2 | a ( u , v ) | c u v {\displaystyle \exists c>0\quad \forall (u,v)\in {\mathcal {H}}^{2}\quad |a(u,v)|\leq c\|u\|\|v\|} ,
    • coercive sur H {\displaystyle {\mathcal {H}}} (certains auteurs disent plutôt H {\displaystyle {\mathcal {H}}} -elliptique) : α > 0 u H a ( u , u ) α u 2 {\displaystyle \exists \alpha >0\quad \forall u\in {\mathcal {H}}\quad a(u,u)\geq \alpha \|u\|^{2}}  ;
  • L ( . ) {\displaystyle L(.)} une forme linéaire continue sur H {\displaystyle {\mathcal {H}}} .

Sous ces hypothèses, il existe un unique u {\displaystyle u} de H {\displaystyle {\mathcal {H}}} tel que l'équation a ( u , v ) = L ( v ) {\displaystyle a(u,v)=L(v)} soit vérifiée pour tout v de H {\displaystyle {\mathcal {H}}}  :

( 1 ) !   u H v H a ( u , v ) = L ( v ) {\displaystyle (1)\quad \exists !\ u\in {\mathcal {H}}\quad \forall v\in {\mathcal {H}}\quad a(u,v)=L(v)} .

Si de plus la forme bilinéaire a {\displaystyle a} est symétrique, alors u {\displaystyle u} est l'unique élément de H {\displaystyle {\mathcal {H}}} qui minimise la fonctionnelle J : H R {\displaystyle J:{\mathcal {H}}\rightarrow \mathbb {R} } définie par J ( v ) = 1 2 a ( v , v ) L ( v ) {\displaystyle J(v)={\tfrac {1}{2}}a(v,v)-L(v)} pour tout v {\displaystyle v} de H {\displaystyle {\mathcal {H}}} , c'est-à-dire :

( 2 ) !   u H J ( u ) = min v H   J ( v ) {\displaystyle (2)\quad \exists !\ u\in {\mathcal {H}}\quad J(u)=\min _{v\in {\mathcal {H}}}\ J(v)} .

Démonstration

Cas général

Par application du théorème de Riesz sur les formes linéaires continues, il existe un vecteur f H {\displaystyle f\in {\mathcal {H}}} tel que

v H L ( v ) = f , v {\displaystyle \forall v\in {\mathcal {H}}\quad L(v)=\langle f,v\rangle } .

Par application de ce même théorème aux formes bilinéaires continues, il existe un endomorphisme linéaire continu A L ( H ) {\displaystyle A\in {\mathcal {L}}({\mathcal {H}})} tel que

u , v H a ( u , v ) = A u , v {\displaystyle \forall u,v\in {\mathcal {H}}\quad a(u,v)=\langle Au,v\rangle } .

La proposition (1) se réécrit alors :

!   u H A u = f {\displaystyle \exists !\ u\in {\mathcal {H}}\quad Au=f} .

Pour prouver cette proposition, il suffit donc de montrer que A est une bijection de H {\displaystyle {\mathcal {H}}} sur H {\displaystyle {\mathcal {H}}} . On montre dans un premier temps que l'opérateur est injectif, puis qu'il est surjectif.

Par la coercivité de a {\displaystyle a} et en appliquant l'inégalité de Cauchy-Schwarz, on a pour tout v H {\displaystyle v\in {\mathcal {H}}}

α v 2 a ( v , v ) = A v , v A v v {\displaystyle \alpha \|v\|^{2}\leq a(v,v)=\langle Av,v\rangle \leq \|Av\|\|v\|}

d'où A v α v {\displaystyle \|Av\|\geq \alpha \|v\|} pour tout v {\displaystyle v} de H {\displaystyle {\mathcal {H}}} , ce qui montre que A est injectif et d'image fermée. Notons Z {\displaystyle {\mathcal {Z}}} cette image. Par le théorème du supplémentaire orthogonal d'un fermé on sait que H = Z Z {\displaystyle {\mathcal {H}}={\mathcal {Z}}\oplus {\mathcal {Z}}^{\perp }} .

Soit ensuite un élément w de Z {\displaystyle {\mathcal {Z}}^{\perp }} , on a par définition A w , w = 0 {\displaystyle \langle Aw,w\rangle =0} et donc :

α w 2 a ( w , w ) = A w , w = 0 {\displaystyle \alpha \|w\|^{2}\leq a(w,w)=\langle Aw,w\rangle =0}

d'où w = 0 {\displaystyle w=0} . Ainsi, Z {\displaystyle {\mathcal {Z}}^{\perp }} est réduit à { 0 } {\displaystyle \{0\}} , ce qui montre que A est surjectif.

L'endomorphisme A est bijectif ; il existe donc un unique u de H {\displaystyle {\mathcal {H}}} tel que A u = f {\displaystyle Au=f} et il est donné par u = A 1 f {\displaystyle u=A^{-1}f} .

Remarque

Sans calculer u, on a l'inégalité

u L α {\displaystyle \|u\|\leq {\frac {\|L\|'}{\alpha }}}

{\displaystyle \|\cdot \|'} désigne la norme de l'espace dual H {\displaystyle {\mathcal {H}}'} .

Cas symétrique

Si la forme bilinéaire a est symétrique, on a pour tout w de H {\displaystyle {\mathcal {H}}}  :

J ( u + w ) = J ( u ) + ( a ( u , w ) L ( w ) ) + 1 2 a ( w , w ) {\displaystyle J(u+w)=J(u)+{\Big (}a(u,w)-L(w){\Big )}+{\frac {1}{2}}a(w,w)} .

Comme u est l'unique solution de la proposition (1), cela donne

J ( u + w ) = J ( u ) + 1 2 a ( w , w ) {\displaystyle J(u+w)=J(u)+{\frac {1}{2}}a(w,w)} .

Et comme a est coercive, on a :

J ( u + w ) J ( u ) + α 2 w 2 {\displaystyle J(u+w)\geq J(u)+{\frac {\alpha }{2}}\|w\|^{2}} .

On a donc J ( u ) J ( v ) {\displaystyle J(u)\leq J(v)} pour tout v H {\displaystyle v\in {\mathcal {H}}} , d'où le résultat (2).

Applications

  • Ce théorème est à la base des méthodes aux éléments finis ; on peut en effet montrer que si, au lieu de chercher u dans H {\displaystyle {\mathcal {H}}} , on cherche u n {\displaystyle u_{n}} dans H n {\displaystyle {\mathcal {H}}_{n}} , un sous-espace de H {\displaystyle {\mathcal {H}}} de dimension finie n, alors :
    • dans le cas où a est symétrique, u n {\displaystyle u_{n}} est le projeté de u au sens du produit scalaire défini par a ;
    • si l'on se donne ( φ i ) {\displaystyle (\varphi _{i})} une base de H n {\displaystyle {\mathcal {H}}_{n}} , le problème se ramène alors à la résolution d'un système linéaire :
      A _ _ u n _ = b _ {\displaystyle {\underline {\underline {A}}}{\underline {u_{n}}}={\underline {b}}} avec A i j = a ( φ j , φ i ) {\displaystyle A_{ij}=a(\varphi _{j},\varphi _{i})} et b i = L φ i {\displaystyle b_{i}=L\varphi _{i}} .
  • On peut obtenir une estimation d'erreur à l'aide du lemme de Céa.

Bibliographie

Haïm Brezis, Analyse fonctionnelle : théorie et applications [détail des éditions]

Articles connexes

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Analyse fonctionnelle
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